TOUJOURS FIDÈLE !
Le 3 octobre 2022 marquait officiellement le 140ème anniversaire de la naissance de l’École Sainte-Marie.
C’est en effet, lors de la rentrée 1882, dans un contexte de fortes tensions anticléricales, suite à la loi Ferry visant la laïcisation de l’Enseignement Public et l’exclusion de fait de l’ensemble des membres du clergé, que naquit notre École, de son véritable nom : « Institution Sainte-Marie ».
Ce fut en effet d’abord une École au sens où nous l’entendons aujourd’hui puisqu’elle n’était composée que des classes Huitième (CM1), Septième (CM2) et de Sixième.
D’abord logée dans les locaux de la Maîtrise derrière la cathédrale, il fallut attendre la rentrée 1887 pour qu’elle rejoigne enfin ses locaux actuels grâce à la générosité de nombreux paroissiens !
Sous la direction de personnalités telles que le célèbre abbé BIROT ou encore le chanoine COMBÈS, l’École prit peu à peu son essor.
Une magnifique chapelle fut édifiée en 1899.
Le bâtiment principal fut achevé durant la Première Guerre Mondiale au cours de laquelle les locaux avaient été réquisitionnés pour en faire un hôpital militaire !
Institution exclusivement tenue par des abbés durant les 90 premières années de son existence, la contractualisation avec l’État en 1959 fut une étape importante de son Histoire. Dès lors, les professeurs ne seraient plus rémunérés en interne mais par le Ministère de l’Éducation Nationale. Peu à peu, les abbés quittèrent leur poste de maître pour rejoindre les paroisses pour lesquelles ils furent nommés. Le dernier abbé à avoir professé à Sainte-Marie fut l’abbé ICHER jusqu’en 1991 ! Le premier directeur laïc fut François BIGEARD en 1974, suivi d’Anne-Marie RAYNAL en 1984 et enfin Dominique GÉRARD depuis 2014.
Cette période fut marquée par de multiples évolutions :
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- l’arrivée de la mixité en 1976 : jusque-là, l’École était réservée aux garçons ;
- une première union eut lieu en 1990 avec l’École du Sacré-Cœur ;
- une seconde union en 2004 avec le Bon Sauveur, créant ainsi l’Ensemble Scolaire d’Amboise, du nom du célèbre archevêque d’Albi, Louis d’Amboise.
Les informations ci-dessous sont extraites de l’excellent travail de synthèse qu’avait réalisé Philippe NÉLIDOFF en 2013 – basé sur le livre du chanoine COMBÈS (Histoire de l’École Sainte-Marie d’Albi (1882-1957), ICSO, 1957) et un ordo diocésain – ainsi que des compléments apportés par Christophe COURRÈGES, notamment pour la période après 1932-1960. Dans un souci de précision, certains passages ont pu être retravaillés et certains informations vérifiées puis modifiées par Johan MATHIEU.
Le temps des fondations (1882-1900)
La fondation de l’École en 1882 s’inscrit dans une période de crise entre l’Église catholique et la Troisième République qui devait conduire finalement à la loi de Séparation du 9 décembre 1905.
A partir de 1880, la République fait de la laïcisation de l’enseignement public, primaire et secondaire, l’un de ses chevaux de bataille. Les enjeux sont très forts de part et d’autre. Les gouvernements républicains se méfient d’une Église qui a retrouvé de très fortes positions dans le domaine de l’enseignement après la tourmente révolutionnaire. L’avènement du suffrage universel masculin en 1848 rend très sensible cette question, en particulier pour l’enseignement primaire, les gouvernements républicains redoutant que l’Église influence défavorablement – du point de vue politique – les élèves, futurs citoyens. De son côté, l’Église reste très réticente à l’égard d’un régime républicain dont la naissance est associée aux violences commises pendant la Révolution. Le centenaire de la Révolution française en 1889 donnera lieu à de nouveaux raidissements, de part et d’autre.
On comprend donc que dans ce contexte, l’archevêque d’Albi de cette époque, Mgr RAMADIÉ (1812-1884), soit intervenu pour lancer le projet de la fondation à Albi, chef-lieu du département du Tarn, d’un nouvel établissement scolaire catholique. Répondant à l’interdiction qui est faite au clergé et aux congrégations religieuses d’enseigner désormais dans l’enseignement public, il s’agit, en usant du principe de liberté de l’enseignement secondaire posé par la loi Falloux de 1850, de créer un établissement secondaire qui puisse concurrencer, à terme, le lycée d’Albi et le collège de Castres et compléter le dispositif des établissements scolaires catholiques constitué à cette époque par l’École de Sorèze, l’école Barral de Castres et les petits séminaires (Castres, Massals près d’Alban, Lavaur, Saint-Sulpice) auxquels il faut ajouter l’Institution Saint-Etienne de Valence d’Albigeois qui recrutent surtout dans les milieux ruraux et ouvriers.
C’est ainsi que le 3 octobre 1882 est ouverte l’Institution Sainte-Marie qui ne compte à ses débuts que 10 internes et 24 externes et s’installe d’abord dans les locaux de la Maîtrise, derrière la cathédrale Sainte-Cécile. Sont ensuite accomplis les premiers pas de cette nouvelle institution :
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- assemblée générale des actionnaires (12 juin 1883) qui élit un conseil d’administration présidé par le vicaire général PUEL et composé de notables catholiques : Germain CROZES (trésorier), les barons GORSSE et DECAZES (anciens députés), le marquis d’ARAGON et deux prêtres (les abbés BOYER et PRUNET, respectivement chanoine de la métropole et curé de Saliès) ;
- approbation des statuts (9 mai 1884) ;
- donation d’un terrain par Germain CROZES ;
Le 19 mars 1885, Mgr FONTENEAU (1825-1899), nouvel archevêque d’Albi, préside la cérémonie de la pose de la première pierre de la nouvelle construction dessinée par l’architecte des édifices diocésains.
Le 4 octobre 1887 se déroule la première rentrée sur le site actuel.
Cette photo rarissime a été prise le 11 janvier 1896 depuis l’avenue Lapérouse (devenue depuis avenue du Général de Gaulle).
Le boulevard Rochegude (fraîchement rebaptisé boulevard Carnot suite à l’assassinat du Président Sadi CARNOT par un anarchiste le 24 juin 1894) est à peine construit, semblable à une digue au milieu des jardins.
L’Institution Sainte-Marie trône ici fièrement en rase campagne depuis l’arrêt de sa construction 9 ans plus tôt. Le bâtiment n’est pas terminé, faute d’argent : la construction des fondations, en terrain instable, a englouti les derniers dons. Seuls la partie orientale de l’École et le dortoir sont finalisés.
Il faudra attendre l’année 1899 pour que la Chapelle soit érigée, tandis que la construction du reste de l’édifice occidental actuel s’étendra de 1914 à 1920.
Les premiers supérieurs sont : l’abbé BOULADE, chapelain de la métropole (cathédrale Sainte-Cécile) ; l’abbé GINESTET ; le chanoine BESSET, secrétaire-général de l’archevêché ; l’abbé Louis BIROT (1863-1936) qui va donner à l’École qu’il dirige de 1894 à 1900 son véritable essor.
Albigeois de naissance et fils d’un contrôleur des postes, Louis BIROT a fait ses études chez les frères de Saint Jean-Baptiste de La Salle puis au lycée d’Albi et au petit séminaire de Castres. Remarqué par ses maîtres qui ont détecté en lui une intelligence exceptionnelle, il obtient son baccalauréat en philosophie et est envoyé au célèbre séminaire de Saint-Sulpice à Paris qui réunit l’élite du clergé. De 1880 à 1885, il profite de l’enseignement de M. HOGAN et de véritables pédagogues qui ne se contentent pas d’érudition mais cherchent à « former l’esprit de leurs élèves, à éveiller leur personnalité, à leur apprendre à juger par eux-mêmes ». Il y noue une solide amitié avec l’abbé Félix KLEIN, futur professeur à l’Institut catholique de Paris, y rencontre l’abbé FRÉMONT, y côtoie des séminaristes de toutes les régions de France et au-delà. Sa formation parisienne terminée, il aurait aimé la prolonger à Rome ou à Toulouse mais son archevêque, Mgr FONTENEAU, le rappelle dans le diocèse et le nomme professeur au petit séminaire de Castres. Ordonné prêtre le 20 mars 1886, il est nommé vicaire à la cathédrale Sainte-Cécile (1888) et aumônier de la garnison d’Albi (1890). En 1894, il devient aumônier de l’hôpital d’Albi puis est nommé supérieur de l’École Sainte-Marie.
De ses six années de supériorat à l’École Sainte-Marie, on retiendra d’abord qu’il aborda les questions de discipline dans un esprit de « modération et de libéralisme », soucieux moins de punir que de faire comprendre et accepter par les élèves la nécessité d’observer les règlements. Il donna aussi une forte impulsion aux études, en élevant le niveau du corps professoral qu’il recrute de préférence muni des diplômes délivrés par l’Institut catholique de Toulouse, quitte à se heurter à certaines réticences épiscopales. Il n’hésite pas à envoyer certains professeurs à l’étranger pour parfaire leur connaissance de la langue. Il s’emploie à ce que les élèves cultivent le goût des belles-lettres et des sciences, pensant que la fréquentation des humanités devait conduire à l’ouverture à l’humanisme. Il lance les conférences des Jeudis littéraires, fait représenter une fois par trimestre une œuvre dramatique du XVIIe siècle, crée une académie littéraire pour les élèves de la seconde à la terminale. Avant tout, il se préoccupe de la formation spirituelle des élèves à travers ses allocutions à la grand-messe dominicale, dans des conférences à l’étude, en faisant comprendre aux élèves que la foi n’est pas d’abord affaire d’observances, de connaissances théoriques ou de pratique rituelle mais doit imprégner toute une vie à travers les actes de la vie quotidienne. Cela correspond – selon les mentalités de cette époque – à l’intelligence de toutes les matières enseignées, la poursuite d’un idéal imprégné des valeurs fondamentales que sont la fidélité, la loyauté, le goût du beau et du grand, une culture élevée, le sens du devoir, la capacité à se sacrifier, l’amour de la patrie, l’esprit de camaraderie, l’engagement dans les grandes causes et le service de la charité, le sens de la justice et du partage.
On doit à Louis BIROT la construction de la chapelle pour laquelle il réussit à réunir les fonds nécessaires et qu’il inaugura le 30 mai 1899 en la fête de Notre-Dame Auxiliatrice.
L’inauguration a lieu un peu plus de deux mois après le décès de Mgr FONTENEAU. Son successeur, Mgr MIGNOT (1859-1918), connait les mérites de l’abbé BIROT et en fait son principal collaborateur en le nommant vicaire général peu de temps après son arrivée à Albi au début de l’année 1900, puis curé-archiprêtre de la cathédrale Sainte-Cécile en 1908.
Appelé à de plus hautes fonctions dans lesquelles il pût donner la mesure de ses talents – en particulier lors de la crise de la Séparation en 1905 et 1906 lorsqu’il se rendit auprès du Pape Pie X pour essayer de défendre l’opinion de son archevêque et de la majorité de l’épiscopat français favorable à une attitude de conciliation envers le gouvernement – Louis BIROT quitta à regret l’École Sainte-Marie en juillet 1900. Il confia plus tard y avoir passé « les plus belles et les plus fécondes années de sa vie ».
Depuis cette époque, cette chapelle a été régulièrement entretenue et ornée.
A l’époque récente, des travaux de réfection importants, concernant les peintures, les enduits et les crépis extérieurs, la toiture, la sonorisation, le chauffage, le réaménagement du chœur dans le sens de la sobriété ont été réalisés grâce au dynamisme du Père Jean ICHER. Ce dernier a su mobiliser les énergies et la générosité des amis de l’École, en particulier ses anciens élèves et faire en sorte que cette chapelle reste ce qu’elle doit être, conformément à la volonté des fondateurs : « le cœur lumineux et le centre de l’École ».
Des célébrations religieuses y ont lieu tout au long de l’année pour les élèves actuels, en particulier lors des temps forts de l’année liturgique. Jusqu’à la pandémie du printemps 2020, une messe dominicale anticipée y était célébrée par le Père ICHER le samedi à 18h, réunissant des personnes du quartier et des anciens élèves.
La formation des élèves est intellectuelle et spirituelle, l’ambition des prêtres éducateurs étant de former des chrétiens aptes à se mouvoir dans la vie sociale, tant du point de vue professionnel qu’en tant que chrétiens. Les exercices spirituels sont nombreux : prières du coucher et du lever, des débuts de cours et d’études, les messes servies, celles du jeudi et du dimanche, les Vêpres, les saluts du Saint-Sacrement, les confessions, les instructions religieuses.
Les aumôniers jouent un rôle particulièrement important, étant chargés tout spécialement de l’instruction religieuse et de la direction spirituelle des élèves. Cette fonction apparaît durant le supériorat du chanoine COMBÈS. Elle est confiée successivement à l’abbé CALMETTES de 1921 à 1927, au chanoine BOULADE (ancien aumônier du Carmel) de 1927 à 1929, au chanoine CRAYOL (ancien supérieur de la Maîtrise) de 1929 à 1956.
École catholique au sens plein de ce terme, sans être un petit séminaire, l’École a permis l’éclosion d’un grand nombre de vocations sacerdotales durant cette période.
Les indications fournies par le chanoine COMBÈS permettent de dénombrer vingt-neuf ordinations de prêtres qui ont été élèves sous la direction des abbés COMBÈS, CAVAILLÈS et ROLLAND, soit près d’une chaque année.
L’ancien élève Jean SAHUQUET sera promu évêque de Tarbes-Lourdes.
Deux autres anciens élèves furent envoyés comme missionnaires au Brésil puis promus évêques : François REY et Maxime BIENNÈS.
Le 24 juin 1953, ce sont deux anciens élèves et professeurs de l’École qui furent tous deux sacrés évêques en la cathédrale Sainte-Cécile : l’abbé Jean-Emmanuel MARQUÈS et l’abbé Gilles BARTHE.
La formation des élèves étant plus large que l’apprentissage des disciplines fondamentales de l’enseignement, de nombreuses activités sont proposées très tôt à l’École : chant, cercles littéraires, activités sportives, mouvements d’action catholique, actions caritatives.
Le chant est particulièrement à l’honneur à l’époque du chanoine COMBÈS car il permet de donner « le plus de splendeur possible aux cérémonies qui se déroulent à la chapelle ». Sont donc activement préparés les chants liturgiques de la Messe et des Vêpres mais aussi des motets et des cantiques.
Fondés à l’époque de l’abbé BIROT, les Jeudis littéraires, organisés autour de conférences, sont relancés par l’abbé CAUQUIL.
L’académie littéraire, datant également de l’époque de Louis BIROT, est ressuscitée par Gustave COMBÈS.
L’École participe aux concours inter-scolaires organisés par l’Institut catholique de Toulouse, ainsi les élèves de philosophie à des concours d’éloquence à l’époque de l’abbé MARQUÈS.
Dans le domaine caritatif, les conférences de Saint Vincent de Paul sont actives.
Des activités liées au scoutisme sont organisées très tôt comme en témoigne une photographie prise en 1930. Plus tard, celui-ci se développe grâce aux abbés ANGLÈS, LAHUERTA et surtout ICHER à partir du début des années 1960.
La croisade eucharistique est animée par les abbés GAUTRAND et MAYNADIER.
Les activités sportives ne sont pas oubliées avec l’installation dans les deux cours de l’École, dès avant la première guerre mondiale, d’une barre fixe, de barres parallèles, d’un portique avec des agrès (anneaux, corde à nœuds, corde lisse) et un mur cimenté pour la pelote basque, encore visible de nos jours.
Un cours de gymnastique suédoise est crée dans chaque classe à l’époque du chanoine COMBÈS et confié à l’abbé NESPOULOUS.
Un court de tennis est installé au-delà de la cour des grands.
Deux équipes de football dans chacune des trois divisions (petits, moyens et grands) s’entraînent sur un terrain loué longeant la voie ferrée côté Castres, à deux kilomètres d’Albi. Des compétitions sont organisées avec d’autres établissements scolaires comme le lycée d’Albi, le petit séminaire de Valence d’Albigeois ou l’École Barral de Castres.
Durant la Première Guerre mondiale, l’École traverse des moments difficiles. Les supérieurs doivent faire face au départ de plusieurs professeurs mobilisés et aux problèmes de ravitaillement, mais doivent aussi trouver, en ville, des locaux de substitution en raison de la réquisition de l’École effectuée par le Ministère de la guerre au profit des militaires hospitalisés.
De 1914 à 1917, l’École est transformée tout entière en hôpital militaire.
Le 14 mai 1922, pour les quarante ans de la fondation de l’École, un monument aux morts est inauguré dans le hall d’entrée, contre l’un des murs de la chapelle.
Ce monument rappelle le souvenir des quarante-sept élèves et deux maîtres – les abbés CHAMAYOU et LAGASSE – morts au champ d’honneur, dont les noms sont inscrits en lettre d’or sur deux plaques de marbre blanc. Entre ces plaques, une statue représente l’un d’eux : le comte Roland de Saint-Vincent (dit Roland de Saint-Vincent Brassac), issu de Brassac et mort au combat en 1917, à 25 ans. Cette statue, qui fut gracieusement donnée à l’École par la famille, était le modèle réduit de la magnifique statue de marbre qui se dresse au centre du village de Brassac : elle sera malheureusement jetée au milieu des années 1980…
Suite à la seconde guerre mondiale, la liste des morts s’allongera de vingt-trois noms : les plaques seront retournées et à nouveau gravées.
Bien que cela ne soit pas gravé, s’ajouteront aux morts ceux des guerres du Maroc (trois noms), d’Indochine (trois noms), de la guerre civile d’Espagne (un nom) et de Corée (un nom).
Le blason de l’École est imaginé à cette époque par le chanoine COMBÈS. La devise « Toujours fidèle » au-dessous du blason, celui-ci comporte :
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- une croix, semblable à une croix de guerre, sur « un fond rouge, couleur de sang » ;
- sur « un fond d’azur », l’étoile du matin, « de la jeunesse », « en l’honneur de la Sainte Vierge » et « pour que nos enfants gardent toujours dans leur cœur pour les éclairer et les diriger sa réchauffante lumière » ;
- des hermines sur « un fond d’argent », « leur blancheur symbolisant la peur de toute tache et l’horreur de toute souillure », exprimant « la richesse de l’esprit, la droiture de la conscience, la pureté du cœur ».
Ce blason est taillé dans la pierre et installé dans la cour des petits, sur une clé de voûte avec la mention “ANNO D. 1914”.
Le 22 mai 1932, le cinquantenaire de l’École est célébré à la cathédrale Sainte-Cécile en présence de plusieurs évêques : Mgr CÉZERAC (archevêque d’Albi), Mgr SALIÈGE (archevêque de Toulouse et futur cardinal), Mgr ROQUES (évêque de Montauban et futur cardinal), Mgr CHAILLOL, évêque de Rodez. Une cantate à deux voix est composée à cette occasion par Léonce de Saint-Martin, ancien élève et organiste de Notre-Dame de Paris. Quatre-cent-cinquante personnes participent au banquet organisé au gymnase municipal.
Le temps de l’épanouissement (1932-1960)
Sept ans après cette cérémonie d’anniversaire, éclatait la Seconde Guerre Mondiale. A nouveau, l’École fut réquisitionnée par la Croix Rouge, mais cette fois-ci, les locaux qui avaient été construits entre 1914 et 1920 (toute la partie ouest des bâtiments du boulevard Carnot, du premier au troisième étage) n’étaient pas mentionnés dans l’ordre de réquisition ! Le chanoine COMBÈS put ainsi garder le dortoir des Grands (actuelle salle d’étude du haut) et aménager le dortoir des Moyens au second étage. Ainsi débuta la « drôle de guerre », où les armées s’observaient sans se battre. L’absence de blessés aurait pu permettre de pouvoir encore utiliser les classes et les études encore inoccupées, mais la direction de la Croix Rouge ne put répondre favorablement à cette requête. C’est donc en ville qu’il fallut installer les différentes classes grâce à l’action de Mgr CÉZÉRAC et de la supérieure du Bon Sauveur ! C’est ainsi que s’acheva la longue direction du chanoine COMBÈS qui fit le lien entre les deux guerres mondiales, puisqu’il dirigeait notre École de 1913 à 1940. Fatigué de ces années de dévouement total à l’École Sainte-Marie, il se retira au Grand Séminaire pour un repos bien mérité.
C’est l’Abbé CAVAILLÈS qui prit la direction de l’École dès le 24 août 1940. Il connaissait tous les rouages de l’École, puisqu’il y vivait depuis 1911 ! Le 4 octobre, la rentrée put se faire dans les locaux de Sainte-Marie, libérés des dames de la Croix Rouge suite à l’armistice de juin. Les années d’occupation allemande se déroulèrent finalement assez calmement au sein de l’École, malgré des difficultés grandissantes pour s’approvisionner en denrées alimentaires. C’était le chanoine PUGET, économe de l’École, qui était chargé de parcourir la région à vélo et solliciter les fermes, du lait, des œufs, des volailles, des légumes et de la charcuterie. Hélas, le pauvre homme, déjà âgé à cette époque, mourût d’épuisement en 1944. Grâce à lui, les élèves ne souffrirent aucune privation durant ces années de conflits.
A l’issue de ces années difficiles, l’abbé CAVAILLÈS passa la main de la direction en 1946 à M. l’abbé MARQUÈS qui revenait d’un Oflag d’Allemagne. C’est cet homme brillant qui relança efficacement la vie éducative, morale et spirituelle de notre École. Sous sa direction, les effectifs ne cessant de croître, fut pris la décision, en 1949, de doubler la taille des dortoirs en ajoutant un second étage au bâtiment surplombant la rue Truel de Palaffre (les actuels laboratoires).
M. l’abbé MARQUÈS espérait bien diriger notre École longtemps encore pour mieux l’embellir et la perfectionner, mais la Providence avait d’autres vues sur son avenir… en effet, le 14 avril 1953, le Pape Pie XII le nomma évêque titulaire ! Un mois plus tard, ce fut l’abbé BARTHES d’être nommé lui aussi évêque de Monaco ! Quelle gloire et quelle fierté pour l’École de voir deux de ses anciens élèves promus à l’Épiscopat. Le 24 juin 1953, les deux nouveaux prélats reçurent la consécration épiscopale des mains de Mgr MOUSSARON devant une quinzaine d’évêques, les représentants de la Principauté de Monaco, le Préfet du Tarn, le Maire d’Albi, les délégués de toutes les administrations publiques, un nombreux groupe d’officiers et une foule qui remplissait la cathédrale !
L’abbé ROLLAND reprit le flambeau de la direction de Sainte-Marie. C’est lui qui nomma, en 1955, un certain jeune professeur de latin, grec et espagnol : l’abbé GAUTRAND, toujours au service de notre École aujourd’hui !
En 1958, l’abbé LAURENT prit la relève de l’abbé ROLLAND à la direction de l’École.
Les années 1950 s’achevèrent par une révolution d’abord silencieuse mais qui allait, à terme, bouleverser l’organisation de l’École Sainte-Marie : l’adoption, le 29 décembre 1959, de la loi sur les rapports entre l’État et les établissements d’enseignement privés, dite loi Debré (du nom de Michel DEBRÉ, Premier ministre et ministre de l’Éducation nationale). Nous y reviendrons plus loin.
Septembre 1963 fut une rentrée particulière : il ne le savait pas encore, mais l’abbé Louis MARAVAL devint le tout dernier directeur ecclésiastique de Sainte-Marie. Durant son directorat, un vent nouveau souffla sur l’École… et sur la société. Celui-ci se souvient encore des évènements d’un certain mai 1968, signe d’un temps bien impétueux… Rendez-vous compte : les jeunes de 1969 étaient moitié moins nombreux à aller à la messe que leurs devanciers de 1954. Une chute spectaculaire, donc, en 1965-1966, avec une déperdition du quart ou du tiers des pratiquants par rapport aux années 1950.
Les temps « modernes » (1970-2022)
La période qui commence au début des années 1970 est marquée par des évolutions de fond : le départ progressif des prêtres remplacés par des laïcs, l’introduction de la mixité, la multiplication des activités culturelles, la volonté de s’adapter aux temps modernes tout en restant fermes sur les bases traditionnelles d’une formation chrétienne.
À partir des années 1980, les responsables sont confrontés aux problèmes du recrutement et du vieillissement des locaux et de leur mise en conformité avec les règles de sécurité. D’où une politique de rénovation les locaux, d’extension des formations et de participation active à la restructuration de l’enseignement catholique au niveau local.
Le départ progressif des prêtres
En 1974, la nomination de deux laïcs témoigne de manière très claire d’une évolution favorable au laïcat : François BIGEARD, professeur de philosophie, est nommé à la direction de l’École ; Fernand VERGELY*, professeur de sciences naturelles depuis 1970, est nommé censeur à la place de deux prêtres (les abbés MARAVAL et ICHER).
* il deviendra directeur-adjoint au début des années 2000 et prendra sa retraite en 2008
Jusque-là, l’École avait fonctionné essentiellement avec un personnel ecclésiastique tant dans les fonctions de responsabilité que dans celles de professeurs et même de surveillance.
De 1972 à 1975 encore, les trois responsables des divisions des grands, des moyens et des petits sont trois prêtres : respectivement les abbés ICHER, JAMMES et CAVAILLÈS.
Déjà, depuis quelques années, des laïcs avaient accédé à des fonctions de professeurs. Ainsi Louis COMBES, depuis les années 1950, pour l’enseignement des mathématiques dans les grandes classes, ensuite remplacé par Jean-Pierre RAUCOULES (ancien président de l’Association des anciens élèves et maîtres au moment du centenaire en 1982, il a pris la retraite en juin 2010).
Dévoués complètement à l’École, ces laïcs prolongent l’engagement total des prêtres qu’ils ont remplacés et par lesquels ils ont parfois été formés. Mais c’est surtout au collège que l’entrée en force des laïcs se fait à partir des années 1950 avec Madeleine AGUIÉ et d’autres anciennes institutrices qui enseignent plusieurs matières telles que les mathématiques, la biologie, la géographie.
Il est vrai que cette période est marquée par le départ de nombreux prêtres, soit qu’ils atteignent l’âge d’une retraite bien méritée, soit qu’ils disparaissent, soit qu’ils quittent leur fonction enseignante pour rejoindre le ministère paroissial. La crise des vocations se faisant de plus en plus sentir, l’autorité épiscopale a tendance à leur demander d’aller en paroisse. Et ils ne sont pas remplacés comme auparavant par de plus jeunes confrères mais par des laïcs, hommes et femmes.
Il est vrai aussi que la crise de mai 1968 est passée par là et que certains prêtres ont été meurtris par la mise en cause de leur autorité qui, jusque-là, était considérée comme naturelle et qui se trouvait désormais parfois contestée. Cette évolution s’est faite lentement. À la fin des années 1960 encore et au début des années 1970, les prêtres étaient fortement présents à l’École, y résidant la plupart du temps. Ainsi en 1970-1971, la liste du corps professoral présent dans l’établissement comporte une forte proportion de prêtres, près de la moitié au lycée, en particulier dans les matières les plus importantes : l’abbé Robert BON en philosophie, l’abbé Robert BOUYSSIÉ en français, l’abbé Jean CABROL en physique-chimie, l’abbé Henri AMIEL en mathématiques, les abbés Jean ICHER et Lucien JAMMES en anglais, l’abbé Marcel GAUTRAND en espagnol, l’abbé Henri MONTLAUR en allemand, le Père CAMAND en latin-grec. Au collège, on trouve également l’abbé Jean-Marie VAYRETTE en français/latin/grec et l’abbé Gaston CAVAILLÈS en anglais, ainsi que les abbés Pierre ROUDOULEUSE et André MAYNADIER qui participent à la catéchèse et à la surveillance.
Au total donc, au début des années 1970, il y a une quinzaine de prêtres qui enseignent et vivent à l’École. Jusqu’à la fin de cette décennie, une matière comme l’anglais est enseignée exclusivement par des prêtres : les abbés CAVAILLÈS (sixième et cinquième), JAMMES (quatrième et troisième) et ICHER (lycée). Ce dernier modifie profondément les méthodes d’enseignement en donnant la préférence à l’oral, mais aussi en mettant en place tout une série de voyages linguistiques avec l’Angleterre, soit durant le mois de juillet dans la banlieue de Londres, soit à travers le jumelage – officialisé en 1972 – avec le diocèse anglican de Chester qui permettra des échanges annuels à partir de 1974 entre les élèves membres de la chorale de l’École Sainte-Marie et ceux de Prestbury, et un peu plus tard des échanges avec l’Allemagne.
D’autres matières sont, dès cette époque, enseignées exclusivement par un personnel laïque qui accèdera à la retraite à partir des années 1990 et dans les années 2000 : l’histoire-géographie, avec M. CAPLANQ-LABORDE, Mme Anne-Marie NESPOULOUS et M. Claude FABRE ; les sciences naturelles avec Fernand VERGELY ; l’éducation musicale avec Mme Janette ENJALRAN ; le dessin avec Raoul VERGNES ; l’éducation physique avec MM. Pierre RÉGI et Bernard PALIS.
Au terme de cette évolution qui a duré plus de vingt ans, les prêtres enseignants ont complètement disparu : les derniers ont été les abbés GAUTRAND, CABROL et ICHER.
L’ouverture à la mixité
Traditionnellement, les familles catholiques envoyaient les garçons à l’École Sainte-Marie et les filles à l’ICECLA qui était le regroupement des écoles catholiques féminines sous tutelle congréganiste, les sœurs du Bon Sauveur ou de Jeanne d’Arc.
La mixité a fait son chemin progressivement : d’abord dans le personnel enseignant, puis à la direction de l’École lorsque Mme Anne-Marie RAYNAL, professeur d’anglais, a succédé à François BIGEARD en 1984. Au milieu des années 1970 encore, les filles de Terminale du Bon Sauveur venaient à l’École Sainte-Marie uniquement dans les sections scientifiques (baccalauréats C et D à l’époque) pour suivre les enseignements de mathématiques, physique-chimie et sciences naturelles. Il y avait aussi la chorale créée par Janette ENJALRAN, qui nécessitait pour chanter à quatre voix de réunir garçons et filles pour les répétitions du mercredi après-midi, la préparation des célébrations religieuses, des concerts et des voyages à l’étranger. Puis, la mixité s’est installée à tous les niveaux de l’enseignement dans la deuxième partie des années 1970.
Anne-Marie RAYNAL, 2012
Les formations et les propositions nouvelles
Aux filières généralistes qui étaient représentées dans les années 1970 et 1980 par la préparation du brevet des collèges et des baccalauréats A (Lettres), B (Sciences économiques), C (Mathématiques) et D (Sciences de la Nature) a été ajoutée, à l’initiative de François BIGEARD, la filière G2 orientée vers les techniques quantitatives de gestion, ce qui a permis de diversifier les formations avec des filières plus techniques qui se sont ensuite développées. On a vu apparaître aussi les sections européennes avec des cours en anglais portant sur diverses disciplines telles que les mathématiques ou l’histoire. Depuis quelques années, il est possible d’apprendre le chinois qui vient s’ajouter aux langues vivantes classiquement enseignées : anglais, espagnol, occitan et allemand. Ouvert en seconde en 2010, cet enseignement est désormais proposé sur les trois niveaux du lycée.
L’École a toujours multiplié, depuis ses origines ou presque, les activités éducatives para-scolaires. Ainsi une plaquette de présentation de l’institution Sainte-Marie, réalisée peu après le centenaire en 1982, dresse la liste suivante : UNSS (sport scolaire de compétition, le mercredi après-midi au stade Lagrèze sous le contrôle des professeurs d’éducation physique), chorale et ensemble instrumental de l’École.
On doit à l’abbé Jean ICHER (professeur de 1959 à 1993), qui fut un pionnier en la matière à partir des années 1970, la mise en place de nombreux échanges culturels et linguistiques en direction de l’Angleterre et de l’Allemagne : échanges franco-anglais (Prestbury, Bexleyheath près de Londres) et stages de deux semaines d’élèves à l’institution King’s school de Maccesfield, échanges franco-allemands (Schweinfurt).
On lui doit aussi les propositions de camps de neige, en particulier à Camurac en Ariège, et les journées d’initiation au ski avec les professeurs d’éducation physique.
S’ajoutent encore un club photo, un club orchestre, le journal de l’École, un club informatique animé par les professeurs de mathématiques, en particulier Jean-Pierre RAUCOULES et Lucien DALMASO.
Ces échanges ont été prolongés jusqu’à aujourd’hui par d’autres professeurs qui ont assuré la relève.
Le rétablissement de l’école primaire
Sainte-Marie avait connu une école primaire fermée en 1968 : l’école Saint-Joseph. Sous la direction de Roland VERGER, elle servait de vivier au recrutement des élèves au collège. Le directeur de Sainte-Marie, l’abbé MARAVAL, venait à l’école Saint-Joseph pour la proclamation des résultats en fin d’année et la plupart des élèves de CM2 allaient poursuivre leurs études secondaires à Sainte-Marie. Mais le recrutement s’est ensuite raréfié et Sainte-Marie a quelque peu souffert de la concurrence du Bon Sauveur tout proche, plus moderne, plus accueillant aussi par des espaces verts et doté d’un plus grand confort. C’est la raison pour laquelle, à la fin des années 1980, a été envisagé par le directeur diocésain de l’enseignement catholique – le frère BERÇON – de rétablir une école primaire sur le site de Sainte-Marie. L’occasion s’est présentée en 1989 lorsque la congrégation des sœurs du Sacré-Cœur de Valence a décidé de vendre les locaux qui abritaient l’école située rue du Roc à Albi. En accord avec cette congrégation, le directeur diocésain de l’enseignement catholique a proposé de transporter cette école primaire dans une partie inoccupée de l’École Sainte-Marie. L’opération était difficile à réaliser du point de vue administratif et surtout financier car il fallait effectuer des travaux importants. Grâce à la ténacité des différents responsables, les obstacles ont pu être surmontés. Des dons et des prêts ont permis de réunir les fonds nécessaires. L’école maternelle et primaire du Sacré-Cœur a pu ouvrir au début des années 1990.
Ainsi donc se trouvent rassemblés, à nouveau, depuis le début des années 1990 sur le site originaire de l’École Sainte-Marie, boulevard Carnot les différents niveaux d’enseignement : l’école maternelle et primaire du Sacré-Cœur, le collège et le lycée.
En 2004 a été réalisée par Mgr CARRÉ, archevêque d’Albi, la nécessaire restructuration de l’enseignement catholique albigeois. Ainsi est apparu l’ensemble scolaire d’Amboise (en référence au grand évêque d’Albi que fut Louis Ier d’Amboise à la fin du XVe siècle) qui réunit l’école maternelle et primaire du Sacré-Cœur, le collège Sainte-Marie et le lycée d’Amboise – tous trois installés sur le site historique de l’École Sainte-Marie – auxquels s’ajoutent les écoles maternelle et primaire du Bon-Sauveur et le collège du Bon-Sauveur. Demeurent actuellement en dehors de cette structure les deux écoles primaires de Saint-Joseph et de Notre-Dame du Breuil.